FIN DE CHANTIER
Des visites de réalisations en cours ou récentes pour écouter les maîtres d’ouvrage et les architectes retracer la genèse de leurs projets, pour en révéler les contraintes, les grandes options et la méthodologie mise en œuvre.
Un débat pour apprécier l’imbrication des rôles, au service du projet.
Scopéli
Réhabilitation d’une salle de sport en supermarché participatif et collaboratif
Nantes, Loire Atlantique
ATELIER FIL
2019
Et si l’architecture était pensée pour impacter au minimum le territoire et les personnes qu’elle investit, en se basant au maximum sur ce qui est déjà-là, que ce soit le matériel et l’immatériel ?
Et si le projet architectural était un moyen de tisser les liens invisibles entre les hommes pour qu’ils puissent réinventer leurs espaces de vie et de sociabilité ?
Et si l’architecture résiliente était évolutive ?
L’architecture résiliente passerait par ces enjeux de partage du projet, de frugalité et d’approche itérative, pour répondre le plus finement à des transformations qui ont lieu aujourd’hui et continuerons demain. Comme un être humain, la résilience passe par une capacité à se laisser guider par le changement, et nous sommes attentifs à ce que nos projets puissent être adaptés au fil de leur vie, en nous concentrant autant aux processus qu’aux résultats. La résilience passe par le bâti tout comme par les personnes qui le métamorphosent et dont nous (a)ménageons leurs espaces.
ATELIER FIL
Scopeli est une réhabilitation d’une salle de sport en supermarché coopératif et participatif.
La programmation atypique, la nature de la maîtrise d’ouvrage (une société coopérative réunissant plusieurs centaines de sociétaires) et le budget extrêmement restreint nous ont conduit à adopter une méthodologie très inclusive afin de suivre les évolutions et ambitions du projet.
L’attention au déjà-là, la valorisation de l’existant et la parcimonie ont guidé la conception des aménagements afin de satisfaire à toutes les normes et fonctionnalités d’un ERP de 5ème catégorie dans lequel les bénéficiaires souhaitaient la participation de tou·tes, avec des impacts minimes sur l’environnement et l’économie (réemploi, matériaux locaux).
Par ailleurs, la maîtrise d’ouvrage testait son fonctionnement interne en temps réel (phase laboratoire), et incluait au fur et à mesure de nouveaux coopérateurs bénévoles : cela a impliqué des réajustements constants de la part de la Maîtrise d’œuvre.
L’Atelier Fil a conçu des aménagements et modifications de l’existant minimaux, dans une co-conception entre MOA et MOE. Grâce à une valorisation du bâti déjà présent sur place, le budget initial de moins de 300€/m² a encore été diminué pendant le projet tout en garantissant une qualité d’usage et d’ambiance.
L’équipe a porté une attention forte aux gisements de réemploi de matériaux à l’échelle du bâtiment existant et les a intégré dans sa conception, avec des supports spécifiques (diagnostic ciblé, plan de repérage, inventaire, évaluation des moyens de dépose sélective). De nouveaux cycles de vie ont été pensé à l’échelle du bâti, à celle des aménagements et à celle des matériaux.
À Scopéli, la résilience s’est jouée aussi dans le renforcement des liens collectifs par le projet architectural. Le projet illustre le processus et le résultat d’une co-conception entre MOE et MOA, ainsi qu’une auto-construction par la MOA sur les finitions, avec des chantiers collectifs.
Les compétences mises en œuvre dans ce projet touchent à la fois à des stratégies constructives et à des stratégies participatives.
Pour les premières, un tel projet nécessite une connaissance des filières locales du réemploi (pour donner et aller chercher), une capacité à réaliser un diagnostic des gisements sur site et dans les structures du réseau, une gestion du stockage (temps et espace) des éléments à réemployer en attendant leur mise en œuvre, une capacité à valoriser les éléments de construction dans les normes actuelles (réemploi en finition pour ce projet).
Pour les stratégies participatives, nous avons déployés des temps et supports de co-conception (« tables de travail » communes entre MOE et MOA, scénarii d’usages) et de formation (axés sur la définition des possibilités d’autoconstruction et sur l’organisation du chantier collectif).
En complément, nous avons participé à des réunions hors maîtrise d’œuvre pour capter les discussions en cours.
L’expérimentation et le recul sur notre pratique sont des piliers de l’agence, les compétences sur ce projet découlent ainsi d’expériences précédentes nous ayant fait évoluer sur ces sujets : scénographies réalisées en réemploi, implication dans des projets d’espaces partagés et recherche-action Zéro déchets du Collectif Fil.
Pendant le projet, des livrables spécifiques ont été créés comme un guide sur le réemploi et l’autoconstruction, afin d’aider la maîtrise d’ouvrage à comprendre et valoriser ses gisements.
Après le projet, la capitalisation nous a permis de définir de nouveaux processus et outils à intégrer dans le métier d’architecte, comme le diagnostic des gisements et l’accompagnement de la Maîtrise d’Ouvrage très en amont sur la pratique du réemploi et l’auto-construction.
Avec ce projet, nous avons mieux défini les limites réglementaires et humaines de ces pratiques, afin de les utiliser à bon escient, et de poursuivre des pistes de recherche ciblées par la suite.