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Atelier de Maroquinerie

Beaulieu-sur-Layon, Maine-et-Loire

DE-SO

2019

Issu à la fois des champs disciplinaires de la physique et de la psychologie, le terme « résilience » désigne les conditions de la « vie après le choc ».
On peut hâtivement dire que cela renvoie à la nature même de l'architecture, à sa capacité à toujours s'adapter aux successives mutations sociales et matérielles. Cependant, cette « nature » s'érode depuis que Toyo Ito a annoncé dans les années 2000 que l'architecture est habitée désormais par deux corps : « le corps humain primitif est lié à la nature », en même temps que « ce corps fait partie du monde électronique ».
Le corps humain, à qui l'architecture s'adressait exclusivement, se double à présent d'un « corps numérique ». L'architecture résiliente doit réaffirmer sa dimension archaïque, le poids de la matière et les savoir-faire laborieux… Et associer dans une même vision économique, la « réutilisation des terres excavées du Grand Paris Express », et le « Recyclage terres rares des composants électroniques »…

DE-SO

L'histoire du projet démarre sur une double proposition : concevoir un « atelier à la campagne » et « depuis le poste de travail ».
L'ambition affichée est de renouveler radicalement la conception des ateliers de maroquineries Vuitton en France, puis en Europe, par la réalisation d'un nouveau standard : un Atelier Agile de 6000 m2, conçu et réalisé en 1 an.
Le Maître d'ouvrage SALV (Société des Ateliers Louis Vuitton) ne nous a pas confié un « programme », mais un objectif à partager et à développer.
La méthode de travail a été générée par les nécessités du projet : itérations rapides et processus collaboratif.

La conduite du projet trouve son écho dans la pratique du « storytelling » pratiqué par la marque pour ses propres productions.
Le projet est donc un récit destiné à la fois à l'intérieur et l'extérieur de l'entreprise. Intérieur, par l'idée de renouveler l'aménagement des postes de travail, favorisant un fonctionnement à la fois flexible et collaboratif.
Extérieur, par la volonté de révéler l'adéquation entre le site de production et son environnement paysager.

L'enjeu du projet associe l'impératif de singularité (image de marque) et d'attachement à un territoire (bassin de ressource des compétences) : l'atelier doit se situer dans un terroir.

Ce premier niveau de résilience propose une alternative au prêt-à-construire et à la construction banalisée des bâtiments d'activités : matériaux de qualité médiocre, terrassements dispendieux, parcs d'activité décontextualisés… L'atelier de maroquinerie est très précisément situé et très précisément dessiné.

Le second niveau concerne la mise en œuvre d'un principe de convergence entre le savoir-faire artisanal des maroquiner(e)s (découpage, façonnage, sertissage, couture, marouflage…) et celui de l'entreprise de construction (découpage, soudure, ajustage, boulonnage, préfabrication, montage…). L'atelier donne à voir sa propre fabrication, sans carénages ni customisation…

Les matériaux sont traités au plus proche de leur nature propre (acier, bois, béton, verre).
La résilience consiste donc à révéler les correspondances étroites entre la construction de l'édifice, et la fabrique du territoire.

​Pour répondre au temps très court du projet, l'obligation de moyen s'est doublée d'une obligation de résultat. Nous avons adopté la « marche en avant » du process, fédérant les énergies… et exigeant la réussite. Le découpage habituel des étapes d'études s'est estompé, pour opérer un «tuilage » des phases, et aboutir à un schéma plus simple : phases de conception sous forme de workshop intensif, puis développements techniques soumis par sujets au planning et à la méthodologie de l'entreprise, puis le chantier synchronisant fabrication sur site, et en atelier.

Ce projet est une co-production entre client-architecte-bet-entreprise.
Le protocole de travail mis en place s'est adapté à l'enjeu : à la fois « dynamique » et « collaboratif ». Dynamique par l'approche itérative entre l'équipe de maitrise d'œuvre et l'équipe interne Maîtrise d'ouvrage, et collaborative par la notion de co-conception étroite entre l'architecte et le Bet structure-enveloppe T/E/S/S. La confiance réciproque étant garante du dispositif, et nécessitant une grande exigence de chacun.

​Le projet de Beaulieu-sur-Layon est l'« Atelier 0 », amorce d'une déclinaison pour d'autres ateliers, sur d'autres points du territoire. Le projet est donc une hybridation entre un projet « unique », et sa reproductibilité sur d'autres sites. Le « standard » reproduit, s'adapte, et mute selon des particularités climatiques et topographiques.
De plus, cette « reproduction » s'amende d'améliorations par retours d'expérience, ajustements de programme, et par croisement avec l'exigence croissante des enjeux environnementaux.

Ceci inscrit le projet des Ateliers Agile dans une démarche quasi « darwinienne » d'adaptation subtile et progressive aux milieux. Mais au-delà, il s'agit aussi de situer cette production bâtie dans une réflexion plus large sur la provenance et le cycle des matériaux, l'économie de moyens dans leur transformation, et l'intelligence de leurs assemblages.
Enfin, chaque futur atelier produira un aménagement paysager « négociant » une interface bioclimatique avec le paysage local, le terroir.

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