FIN DE CHANTIER
Des visites de réalisations en cours ou récentes pour écouter les maîtres d’ouvrage et les architectes retracer la genèse de leurs projets, pour en révéler les contraintes, les grandes options et la méthodologie mise en œuvre.
Un débat pour apprécier l’imbrication des rôles, au service du projet.
Espace Agnès Varda
Pôle d'accueil, de restauration, de prévention et d'hygiène pour la grande précarité nantaise
Nantes, Loire Atlantique
ATELIER MIMA
2020
Associé à BRUT ARCHITECTES
L’architecture résiliente travaille dans le temps à l’organisation des outils de structuration, de lien, de compréhension et d’accompagnement de l’Homme afin d’habiter le monde quel qu’il soit.
Les propositions architecturales doivent prendre parti, en articulant l’histoire et les prédictions, sans aucun alibi possible vis-à-vis des informations dont nous disposons.
Voici les quelques critères nous semblant permettre ces possibles décisions de projet :
- Proposer des espaces aux qualités universelles, capables de franchir les modes afin de garantir leur pérennité ;
- Considérer l’économie de ressources sur le temps long, et l’utilisation des matérialités et modalités constructives efficientes ;
- Équilibrer l’ambition aux budgets légitimes, à la recherche d’un « juste nécessaire », sans superflu, dans une logique de frugalité globale ;
- Tenter l’émotion, valeur essentielle, comme point de départ à l’ouverture et au partage ;
- Expérimenter des solutions, et permettre la construction d’exemples, considérant l’architecture comme outil de participation aux débats contemporains ;
- S’accrocher au milieu, et éprouver la situation des projets afin de faire propos commun, de parler en place.
ATELIER MIMA
ASSOCIÉ À BRUT ARCHITECTES
L’enjeu du projet tient dans l’articulation de paradoxes : le bâtiment doit être autant un lieu de rassemblement, ouvert sur la ville et accueillant pour ses usagers qu’un endroit où se ressourcer, où l’intimité doit être respectée et préservée.
Des principes tendent ainsi à se formuler, qui sont les tuteurs du projet :
- Trois niveaux pour trois services, liés par un long escalier ouvert collé à la rue, articulant le pavé de la rue au ciel du toit pour affirmer la vocation unitaire et universelle de cet équipement ;
- Des lumières naturelles hiérarchisant les espaces, franches et entières sur l’accueil, séquencées aux paliers, filtrées sur les douches et soins ;
- Des propositions complémentaires de rapports spécifiques au milieu urbain, par des cadrages conquérants sur la rue, par des vues dissimulées, ou de larges terrasses sous pergola, au milieu des logements voisins, offrant un rapport inattendu, discret et privilégié à l’extérieur ;
- L’utilisation de matériaux reconnaissables et complémentaires : l’inaltérabilité du béton et la domesticité du bois, mis en œuvre par préfabrication d’éléments dont l’assemblage raconte la liberté prise, et montrée possible, par le motif du joint.
Ce projet comporte différentes réponses à l’objectif de résilience explicité plus haut :
Par le programme :
- Il s’agit d’accompagner les plus démunis dans un lieu pensé comme un abri ouvert
- De nombreux moments d’échange ont eu lieu avec passagers et personnel afin de permettre une réponse adaptée et partagée
Par l’architecture :
- Travail d’un bâtiment compact, creusé, limitant la consommation de matière
- Fluidité des espaces et des parcours, lumière naturelle omniprésente
- Utilisation de pré-murs béton, proposant une face béton intérieure afin d’optimiser la pérennité
Par la technique :
- Chaudière numérique expérimentale, permettant de chauffer l’eau nécessaire aux douches par des serveurs de DATA
- Préfabrication de l’ensemble des façades, béton et bois, permettant un gain de temps et d’énergie sur le chantier
- Utilisation du bois dès que possible, et notamment dans les systèmes de claustra et pergolas
Le projet repose sur plusieurs acteurs aux compétences variées :
- Association de deux « jeunes » cabinets d’architecture nantais, Atelier MIMA (mandataire) et BRUT (associés), volontaires et conscients de l’importance de l’enjeu, qui ont proposé différents ateliers afin de partager les réflexions avec les utilisateurs du lieu.
- Travail avec les BETs a été important pour permettre la préfabrication de l’entièreté du bâtiment, et l’intégration des nombreuses contraintes spécifiques.
- Réalisme de l’équipe face aux contraintes d’utilisation sur ce type de programme.
- Ambition de la ville à la réalisation d’un bâtiment ambitieux, social, dans un quartier de logements.
Notre premier équipement public, de nécessité sociale majeure, situé dans le quartier de création de l’Île de Nantes, a été une aventure importante pour l’ensemble de l’équipe.
Outre les ambitions architecturales et politiques cristallisées ici, le bâtiment devait avant toute chose offrir un moment de quiétude aux passagers, ce qui est resté notre principal objectif.
En écho à P-A-R-I, il nous semble que le nouvel espace Agnès Varda, par la qualité des équipes, des services et du soutien proposé, et aussi peut-être par l’architecture, est un équipement participant à la résilience des plus démunis.